La
maladie
des
tiques
fait
son
trou
en
France
Elle
a
longtemps
été
considérée
comme
une
maladie
rare.
Avec
27
000
à
35
000
nouveaux
cas
par
an,
la
maladie
de
Lyme,
transmise
par
les
tiques,
devient
un
phénomène
de
santé
publique.
Face
à
cette
infection,
les
médecins
manquent
d’outils
fiables.
Des
députés
appellent
à
une
meilleure
prise
en
charge.
Présente
dans
65
pays,
la
maladie
de
Lyme,
découverte
dans
les
années
1970
à
Lyme
(Connecticut,
États-Unis),
gagne
du
terrain
en
France.
Elle
reste
pourtant
mal
connue
des
médecins
et
mal
diagnostiquée.
La
semaine
dernière,
deux
députés
UMP
ont
déposé
une
proposition
de
loi
pour
une
meilleure
prise
en
charge
de
cette
maladie,
mais
elle
n’a
pas
été
adoptée.
Ces
élus
se
sont
appuyés
sur
un
rapport
du
Haut
conseil
de
la
santé
public,
publié
en
décembre.
Ce
document,
pour
la
première
fois,
fait
un
état
des
lieux
de
la
situation
nécessaire
à
une
vraie
politique
de
lutte
contre
la
maladie
de
Lyme.
Une
tique
femelle
adulte,
gorgée
de
sang.
Au
stade
de
larve,
elle
n’est
pas
plus
grosse
qu’un
grain
de
beauté.
(Photo
:
Jérôme
Fouquet/Ouest-France)
UNE
MALADIE
TRANSMISE
PAR
LES
TIQUES. La
maladie
de
Lyme
ou
«
borréliose
de
Lyme
»,
est
causée
par
une
bactérie,
la borrelia
burgdorferi, transmise
par
la
tique Ixodes
ricinus,
la
plus
présente
en
France.
Cette
tique
vit
de
deux
à
six
ans.
Pour
passer
chaque
stade
de
son
développement
(larve,
nymphe
et
adulte),
elle
se
nourrit
du
sang
d’animaux
sauvages,
du
rongeur
au
cerf.
L’homme
n’est
qu’un
réservoir
accidentel
pour
la
tique,
tout
comme
les
animaux
domestiques.
Le
risque
de
contracter
la
maladie
reste
limité
aux
10
%
environ
de
tiques
infectées
par
la borrelia (jusqu’à
18
%
en
Alsace
et
Puy-de-Dôme,
9
%
dans
le
Calvados).
C’est
en
avril-mai
que
le
risque
est
le
plus
grand.
UNE
PROPAGATION
EN
FRANCE. Ces
acariens,
qui
aiment
chaleur
et
humidité,
prolifèrent,
peut-être
sous
l’effet
du
réchauffement
climatique
mais
aussi
du
reboisement
et
de
l’engouement
pour
les
activités
de
plein
air.
Les
tiques
affectionnent
les
forêts,
les
hautes
herbes,
fougères
ou
buissons.
On
les
trouve
désormais
sur
tout
le
territoire
français,
à
l’exception
du «
pourtour
méditerranéen
et
la
bande
côtière
atlantique
»,explique
Louis
Teulières,
médecin
généraliste
et
infectiologue,
expert
reconnue
de
la
maladie
de
Lyme. «
Il
n’y
en
a
pas
non
plus
au-dessus
de
2
500
m
d’altitude. »
Avec
l’avancée
des
tiques,
la
maladie
de
Lyme
se
propage.
Un
temps
cantonnée
à
l’Est
de
la
France,
elle
flambe
à
présent
en
Auvergne
ou
Limousin.
DES
SYMPTÔMES
DE
TOUTES
SORTES. Beaucoup
de
patients
sont
traités
et
guéris
sans
problème
juste
après
l’apparition
d’un
«
érythème
migrant
»,
cette
grande
tache
rouge
sur
la
peau.
Mais
d’autres
se
plaignent
de
douleurs
articulaires
et
musculaires,
arthrite,
problèmes
cardiologiques,
paralysie
faciale,
jusqu’à
perdre
l’usage
des
membres
:
des
formes
extrêmes
de
la
maladie
peuvent
apparaître.
C’est
celles-ci
qui
posent
problème.
«
Dans
les
mois
ou
les
années
qui
suivent
une
morsure
de
tiques,
certains
patients
se
plaignent
de
symptômes
cliniques
très
polymorphes,
invalidants
», confirme
le
rapport
du
HCSP. «
Leur
principal
symptôme, confirme
Éric
Caumes,
médecin
et
chercheur
à
la
Pitié-Salpétrière,
à
Paris, est
la
fatigue
ou
la
fybromyalgie », c’est-à-dire
une
grande
fatigue
associée
à
des
douleurs
dans
plusieurs
endroits
du
corps.
Tiques
en
liberté,
dans
le
documentaire
«
La
maladie
de
Lyme,
quand
les
tiques
attaquent
!
»
(Photo
:
Chantal
Perrin/France
5)
UN
DIAGNOSTIQUE
INCERTAIN. Les
médecins
avouent
leur
difficulté
à
mettre
l’étiquette
de
la
maladie
de
Lyme
sur
tous
ces
maux. «
C’est
une
maladie
par
définition
multiforme, explique
Louis
Teulières, car
la
bactérie borrelia se
niche
dans
des
cellules
très
diverses,
peut
se
cacher
pendant
un
moment,
et
se
propage
très
rapidement
par
l’enveloppe
des
vaisseaux
qu’elle
enflamme. » De
là
son
surnom
de
«
grande
imitatrice
».
Pour
Éric
Caumes, « il
n’existe
pas
de
diagnostic
vraiment
fiable,
plutôt
un
faisceau
d’arguments.
Dans
trois
quarts
des
cas
des
gens
qui
consultent
pour
Lyme,
je
trouve
finalement
autre
chose :
un
rhumatisme
chronique,
une
maladie
inflammatoire,
une
scoliose,
une
apnée
du
sommeil…
ou
un
harcèlement
au
travail !
»
Le
médecin
cite
l’exemple
de
cet
homme
de
60
ans,
qui
présentait
des
symptômes
neurologiques
et
articulaires
aux
jambes,
et
qui
souffrait
en
fait
de
deux
arthroses
:
une
aux
genoux
et
une
à
la
colonne
vertébrale.
Autre
difficulté
:
les
tiques
sont
soupçonnées
de
transmettre
parfois
plusieurs
infections.
Un
test
controversé.
Le
diagnostic
peut
être
appuyé
par
des
tests
en
laboratoire.
La
marche
à
suivre
est
prévue
par
un
accord
de
2006
qui
prévoit
deux
tests,
«
Elisa
»
puis
«
western
blot
».
Malheureusement,
ils
sont
jugés
au
mieux
peu
performants,
au
pire
peu
fiables,
par
la
communauté
médicale.
UN
NOMBRE
DE
MALADES
MAL
CONNU. Le
réseau
Sentinelle
de
l’Institut
national
de
veille
sanitaire
estime
à
35
369
le
nombre
de
nouveaux
cas
par
an
en
moyenne.
Le
rapport
du
HCSP
donne
une
incidence
moyenne
de
27
000
nouveaux
cas
par
an.
Mais
les
associations
de
malades
dénoncent
une
sous-estimation
du
phénomène.
En
Europe,
on
compte
65
000
à
85
000
nouveaux
cas
par
an,
et
300
000
aux
États-Unis.
UN
TRAITEMENT
TÂTONNANT. La
maladie
de
Lyme
se
traite
par
antibiotiques. «
Un
mois
d’antibiotiques
adaptés,
pas
plus.
Au-delà,
ce
n’est
pas
le
Lyme », estime
Eric
Caumes.
Louis
Teulières
prescrit
trois
semaines
d’antibiotiques
différents
(ampicilline,
macrolides
puis
cyclines). «
Après
cela,
si
l’état
du
patient
ne
s’améliore
pas,
ce
n’est
pas
Lyme.
» Mais
certains
médecins,
constatant
que
des
patients
sont
loin
d’être
guéris
après
ces
vingt-sept
jours
de
traitement,
renouvellent
le
traitement.
D’autres
cherchent
du
côté
des
médecines
douces,
comme
la
phytothérapie.
DES
PATIENTS
DÉBOUSSOLÉS. Souvent
testés
négatifs
pour
Lyme,
ces
patients
semblent
condamnés
à
une
errance
médicale,
de
généralistes
en
psychiatres,
de
naturopathes
en
ostéopathes.
«
Les
malades
que
je
vois,
dans
les
150
par
an,
ont
de
très
longs
parcours
médicaux, dit
Eric
Caumes. Compliqués
à
gérer,
ils
nécessitent
d’être
vus
et
interrogés
longtemps,
jusqu’à
une
heure. »
Au
moins,
sont-ils
maintenant
officiellement
reconnus
: «
Il
paraît
clair
qu’il
existe
un
nombre
important
de
patients
souffrant
de
symptômes
chroniques
et
invalidants
étiquetés
« maladie
de
Lyme »
sans
certitude
du
fait
de
la
négativité
des
tests
biologiques,
ou
de
la
persistance
des
anticorps
faussant
leur
interprétation.
Probablement
certains
pourraient
être
une
maladie
de
Lyme,
échappant
à
des
tests
biologiques
imparfaits, conclut
le
rapport
du
HCSP.
Pour
marcher
dans
les
bois,
il
faut
se
couvrir.
L’IMPORTANCE
DE
LA
PRÉVENTION. Il
est
donc
particulièrement
important
d’agir
au
plus
tôt.
Enlever
la
tique
dans
les
12
à
24
heures,
avec
un
tire-tique,
élimine
quasiment
le
risque
d’infection.
Il
faut
systématiquement
s’inspecter
la
peau
au
retour
d’une
rando.
Et
pour
aller
se
promener
dans
les
bois,
porter
des
chaussures
fermées,
des
manches
et
pantalons
longs
protègent
des
morsures
de
tiques.